Michaela Yearwood-Dan : la nouvelle peintre qui passionne

[01/09/2023]

Inconnue sur le marché des enchères il y a deux ans, Michaela Yearwood-Dan est propulsée parmi les 500 artistes mondiaux les plus performants cette année. Décryptage d’une peinture au succès détonnant.

 

Elle cumule déjà deux millions de dollars de ventes aux enchères depuis le début de l’année 2023. Deux millions pour sept toiles qui ont toutes explosé les estimations initiales des grandes maisons de ventes. L’une d’elle,  Love me nots (2021), a atteint pas moins de 884 000$ chez Christie’s à la fin du mois de février, dépassant de plus de dix fois le prix conseillé, l’estimation haute ayant été établie à 72 000$. Si ce record provient de Londres où l’artiste est établie, les prix des toiles de Michaela YEARWOOD-DAN (1994) s’envolent tout aussi bien lorsque les ventes sont organisées à New York ou à Hong Kong. Christie’s, Sotheby’s et Phillips ont chacune fait l’expérience du succès phénoménal de cette puissante artiste, qui n’a pas encore fếté ses 30 ans.

 


Je pense qu’il y a une vulnérabilité et une force à être une femme, une artiste noire et une artiste queer qui parle de sujets comme l’amour sous une forme très personnelle et journalistique. 

Michaela Yearwood-Dan


 

Née dans le sud de Londres en 1994, Yearwood-Dan vit et travaille toujours à Londres où elle a déjà exposé à plusieurs reprises, s’imposant rapidement comme l’une des jeunes artistes abstraites les plus en vue du Royaume-Uni. Un moment déterminant dans sa carrière artistique naissante advient en 2017 : elle est alors soutenue par Bloomberg New Contemporaries, une organisation qui donne de la visibilité aux artistes en début de carrière, à travers une exposition itinérante. En 2019, elle fait l’objet d’une exposition personnelle à la Fondation Lee Alexander McQueen, puis à la Galerie Marianne Boesky en 2021. En 2022, Yearwood-Dan crée une grande installation dans le cadre de l’inauguration du centre culturel du Queercircle dédié au rassemblement des communautés LGBTQ+. La même année, elle participe à la troisième résidence annuelle des grandes femmes artistes au Palazzo Monti, expose avec la galerie Tiwani Contemporary (The Sweetest Taboo) et réalise sa première exposition personnelle à New York, Be Gentle With Me, à la galerie Marianne Boesky. Depuis 2021, sa portée s’est déjà considérablement internationalisée et ses toiles ont attiré l’attention de collectionneurs importants, notamment grâce à sa présence sur la Frieze de Los Angeles avec Tiwani Contemporary cette année. Plusieurs articles ont par ailleurs salué son travail pictural comme l’un des plus passionnant du moment.

Distribution géographique du produit des ventes aux enchères de Michaela Yearwood-Dan (copyright Artprice.com)

 

Une abstraction qui revendique le droit d’être belle et ouvertement féminine

Ce travail abstrait repose sur des œuvres à la touche tourbillonnante et aux couleurs vives, dans lesquelles l’artiste inclut des bribes de textes. Il s’agit d’œuvres de grandes dimensions dont l’ampleur volontaire vise à imposer la présence de la peinture dans l’espace. Il s’agit d’inviter les spectateurs à “baigner” dans la toile et à passer du temps avec. Pour Michaela Yearwood-Dan, le rapport à la peinture est avant tout une expérience à vivre et il arrive qu’elle construise ses expositions comme des expériences sensibles plus élaborées, avec bande sonore et effluves d’encens. Cette possibilité d’évasion, de joie et de beauté à contempler, constitue un acte de résistance en elle-même.

En tant qu’artiste noire queer, Michaela Yearwood-Dan ne cherche pas à ce que son travail devienne un porte-parole des minorités ethniques, culturelles ou sexuelles. Sans chercher à investir la voix d’une communauté et en restant subjective, elle incorpore néanmoins à ses œuvres des signifiants culturels autour des thèmes de l’amour, de la vulnérabilité, de la féminité et de son héritage antillais. Elle explique que sa pratique est orientée vers l’auto-historisation, principalement exécutée à travers la peinture abstraite à grande échelle.

Indéniablement, la pratique de Michaela Yearwood-Dan, sa liberté de ton, sa façon de s’inscrire au cœur des questionnements socio-culturels sans pour autant les récupérer comme des faire-valoir, apporte une respiration recherchée sur le marché de l’art. Les collectionneurs l’ont si bien plébiscitée qu’ils l’ont hissé au 388 rang des artistes les plus performants au monde au S1 2023, toutes catégories et toutes époques confondues, avec un produit des ventes aux enchères établi à 2,6m$, avant les prochaines grandes de fin d’été et d’automne…