La Chine, avec Hong Kong

La Chine, avec Hong Kong

Déjà, l’an dernier, nous constations une extraordinaire montée en puissance de Hong Kong sur le segment contemporain (voir notre Rapport sur le Marché de l’Art contemporain 2021), et ce grâce à des choix audacieux, notamment sur la création la plus actuelle.

La ville-état est alors devenue la deuxième place de Marché de l’Art Contemporain derrière New York (pour les artistes nés après 1945), grâce aux performances époustouflantes enregistrées là-bas par Christie’s, Sotheby’s, Phillips, Poly International et China Guardian.

De nombreux records y ont été marqués par des artistes non asiatiques, tels que le Suisse Nicolas Party, la Pakistanaise Salman Toor, le Ghanéen Amoako Boafo, la Nigériane Toyin Ojih Odutola, ou encore les Américaines Avery Singer, Loie Hollowell et Emily Mae Smith. Des records d’autant plus remarquables qu’auparavant, la nouvelle génération asseyait sa cote depuis New York ou Londres, jamais depuis Hong Kong. Cette année, l’île poursuit son rôle d’accélérateur dans la progression des prix de l’art ultra-contemporain et rivalise à ce titre avec les meilleures places de marché occidentales du secteur.

Les œuvres les plus valorisées des ventes hongkongaises sont généralement des créations d’artistes non asiatiques. Les Américaines Loie Hollowell, Lucy Bull et l’Anglais MR Doodle doivent par exemple plus de la moitié de leurs résultats aux ventes de Hong Kong :

  • Loie HOLLOWELL (1983) : l’artiste soutenue par la Pace Gallery réalise 55% de son résultat semestriel à Hong Kong, contre 26% dans son propre pays.
  • Lucy BULL (1990) : elle doit aussi plus de la moitié de ses performances à la vitalité du marché hongkongais : 53% contre 33% à New York.
  • MR DOODLE (1994) : l’artiste anglais est essentiellement représenté par Pearl Lam Galleries (Hong Kong, Shanghai, Hangzhou) et bénéficie d’une immense popularité en Asie : 58% de son produit des ventes semestriel proviennent de Hong Kong et 13% de Tokyo. Il est l’artiste de moins de 40 ans le plus vendu, avec 125 transactions au cours du premier semestre 2022.

Aujourd’hui, la Chine génère le quart du résultat semestriel mondial pour l’art ultra-contemporain (50,6m$), grâce à l’activité menée depuis Hong Kong par Sotheby’s, Christie’s et Phillips, qui multiplient les records pour les jeunes stars du Marché de l’Art international.

Sur place, l’activité des trois maisons de ventes a de plus en plus de poids : Christie’s y enregistre 30% de son résultat d’art ultra-contemporain (16,3m$ au S1 2022); Sotheby’s 18% (11,1m$), et Phillips 48%, soit près de la moitié de ses performances mondiales sur le secteur ! Il convient aussi de souligner que les ventes d’art ultra-contemporain engendrent parfois des résultats plus importants depuis Hong Kong que depuis Londres ou New York ! Un renversement difficilement imaginable il y a trois ou quatre ans. C’est le cas pourtant pour les maisons de ventes Christie’s et Phillips, dont voici les derniers résultats :

Produits des ventes pour l’art ultra-contemporain (S1 2022)

  • Christie’s Hong Kong (16,3m$) vs Christie’s Londres (12,7m$)
  • Phillips Hong Kong (15,3m$) vs Phillips New York (13,3m$)

Notons par ailleurs que la croissance de Phillips Hong Kong est époustouflante : ses 15,3m$ obtenus par la vente d’art ultra-contemporain sur le premier semestre constituent un résultat quinze fois supérieur à celui enregistré au cours du premier semestre 2019.

En juin 2021, Phillips fait le pari d’introduire de jeunes artistes sur le marché des enchères asiatiques avec le soutien de Poly International. Elle établit à cette occasion de nouveaux records mondiaux, notamment avec Salman Toor, Jadé Fadojutimi, Loie Hollowell et Ayako Rokkaku. Cette année, Phillips allonge encore sa liste de records, obtenant, entre autres, ceux de Lucy Bull, Trey Abdella et Ben Sledsens.

Artistes de moins de 40 ans : distribution par salle de ventes du produit des ventes aux enchères de Fine Art et NFT au S1 2022

Artistes de moins de 40 ans : distribution par salle de ventes du produit des ventes aux enchères de Fine Art et NFT au S1 2022

Le résultat de Phillips Hong Kong pour l’art ultra-contemporain est supérieur à celui que réalise la maison de ventes à New York sur le premier semestre 2022 !

Conclusion

L’attrait grandissant pour l’art ultra-contemporain est évident sur les trois places de marché principales – États-Unis, Royaume-Uni et Chine avec Hong Kong  –, où les cotes explosent rapidement pour de nouveaux jeunes artistes déjà très bien soutenus par les institutions et les grandes galeries. Mais cette tendance est plus globale et se propage dans d’autres pays. Si les montants obtenus sont moins exceptionnels ailleurs que dans les trois centres de gravité du marché haut de gamme, d’autres places de marché affichent néanmoins des résultats extrêmement encourageants, reflet d’une demande plus enthousiaste que par le passé.

Citons Tokyo qui, sans rivaliser directement avec Hong Kong, se positionne sur le continent asiatique comme une plaque tournante pour les artistes contemporains établis (Andy Warhol, Yoshitomo Nara, Yayoi Kusama), mais aussi pour de jeunes artistes tels que Mr Doodle ou Ayako Rokkaku. Au Japon, le produit des ventes de l’art ultra-contemporain progresse d’ailleurs de +55% entre le S1 2021 et le S2 2022, pour un nombre de lots vendus stable. À défaut d’une multiplication des transactions, ce sont les niveaux d’adjudications qui augmentent, tout comme l’esprit de compétition des enchérisseurs.

Citons aussi la Corée du Sud, qui étonne par sa soudaine vitalité : avec un produit des ventes semestriel en hausse de + 617% (pour atteindre 7,1m$), elle devient la cinquième place de marché la plus importante au monde pour la vente aux enchères d’art ultra-contemporain.

Arrive ensuite la France, avec 3,2m$ d’œuvres échangées au S1 2022, un résultat en progression de +94%. Cette dynamique ne repose pas, comme c’est le cas pour les marchés américain et britannique, sur une nouvelle génération domestique, mais sur des artistes étrangers particulièrement convoités en ce moment. En l’occurrence, les artistes Aboudia Abdoulaye DIARRASSOUBA, Eddy Ilunga KAMUANGA et Ayako ROKKAKU, qui ont insufflé au Marché de l’Art ultra-contemporain français les plus beaux résultats de la première partie de l’année 2022.